Publié le 12 Juin 2015
Suite à une demande du Laboratoire Départemental d'Archéologie du Val-de-Marne, nous avons réalisé au printemps, un petit film sur la fabrication d'un bracelet en schiste. A ce titre, nous tenons encore à remercier Dominique et Marie pour la prise de vue, le montage et la logistique...
De tels bracelets apparaissent aux environs du 5ème millénaire, au sein de communautés d'agriculteurs-éleveurs néolithiques des cultures du Villeneuve-Saint-Germain (moitié Nord de la France) et du groupe de Blicquy (Belgique). Ces groupes ont su tirer profit des ressources minérales qui les entouraient aux marges des massifs armoricain et ardennais (régions où les schistes abondent), pour développer une véritable économie régionale de fabrication et d’exportation de bracelets en schiste.
Bracelets en schiste poli et autre mobilier lithique provenant des fouilles d'habitats néolithiques de Betton en Ille-et-Vilaine. © H. Paitier, Inrap.
L’extraction est réalisée sur des affleurements transformés en véritables carrières. Les carriers détachaient des plaques de schiste à l’aide de masses en pierre, de pics en bois de cerf ou autres coins et leviers en bois. Ils formaient ensuite par percussion des ébauches à partir de plaquettes de bonnes qualités. Le travail s’arrête généralement à ce stade sur le lieu d’extraction.
La suite des opérations se déroule sur des ateliers ou au sein d’habitats, généralement distants de quelques kilomètres des carrières (par exemple à Champfleur ou Arçonnais dans la Sarthe ou à Vaux-et-Borset en Belgique). Les ébauches y sont alors façonnées en palets circulaires de 10 à 20 cm de diamètre, régularisés par polissage au niveau des contours et des faces.
Le bracelet s’obtient ensuite en évidant la partie centrale du palet circulaire. Plusieurs techniques ont pu être observées et reproduites expérimentalement (raclage, piquetage, rainurage ou forage).
La phase suivante consiste à élargir et régulariser la perforation à l’aide d’outils en silex (burins) et de polissoirs en grès. C’est une phase laborieuse qui s’accompagne souvent de casse (BURNEZ-LANOTTE, L. et. Al. 2005). Enfin, l’ultime étape consiste à polir puis lustrer soigneusement le bracelet, à l’aide de grès fins ou d’une pièce de cuir mouillée ou graissée sur laquelle on ajoute un abrasif (sable fin, poudre de charbon ou cendres de prêles).
Il est fréquent pour ces périodes de retrouver ces bracelets aussi bien dans des fosses détritiques d’habitats (où ils sont généralement brisés) que dans des sépultures où un à plusieurs bracelets, souvent portés au dessus du coude, accompagnent le défunt. Au-delà des aspects techniques et esthétiques, ces bracelets semblent aussi porter de fortes valeurs sociales et symboliques.
Pistes bibliographiques :
BURNEZ-LANOTTE, L., CASPAR, J.P. 2005. Technologie des anneaux en schiste dans le groupe de Blicquy/Villeneuve-Saint-Germain à Vaux-et-Borset (Hesbaye, Belgique) : interférences de sous-systèmes techniques. Bulletin de la Société Préhistorique Française T.102, n°3, pp. 551-596.
FROMONT, N. 2005. Les anneaux de pierre dans le nord de la France et la Belgique au Néolithique ancien : structuration des productions et circulation des matières premières. MARCHAND, G., TRESSET, A. 2005. Unité et diversité des processus de néolithisation sur la façade Atlantique de l'Europe (6ème et 4ème millénaire BC). Table-ronde de Nantes, 26-27 avril 2002, Mémoire n°36, Société Préhistorique Française.
PRAUD, I., et. al. . (2000). Les bracelets en pierre du néolithique ancien : provenance et diffusion des matériaux sur les sites Villeneuve-Saint-Germain du bassin Parisien. DESBROSSES, R., THEVENIN, A. (dir.) Actes des 125èmes Congrès Nationaux des Sociétés Historiques et Scientifiques : pp. 491-502.